En bref :
Sept semaines séparent la fête de
Pessah', célébration de la sortie d'Égypte, de
Chavou` oth, révélation au Mont Sinaï.
La Loi juive établit le commandement d'observer le compte des jours qui s'étendent entre ces deux fêtes : depuis le deuxième jour de Pessah', jusqu'à Chavou`ot. Cette période s'appelle le Ômer - עומר, du nom de la mesure d'orge que la nation devait apporter en offrande au Temple le deuxième jour de Pessah', comme témoignage de gratitude à l'Éternel pour le produit des champs.
Le compte n'est pas à rebours : les jours sont comptés croissant l'un après l'autre depuis le deuxième jour de Pessah', en Israël comme ailleurs.
Outre le commandement toraïque de respecter ce comptage, l'escalade des 49 jours depuis Pessah' jusque Chavou`ot représente l'ascension des 49 degré de puretés qui séparent l'état dans lequel se trouvaient les Hébreux en esclavage, du 50ème état de pureté absolue dans lequel ils durent se tenir pour permettre la révélation de D'ieu et le cadeau de la Torah.
De nos jours, sans le Temple, nous ne faisons plus d'offrande. Cependant le comptage est remplacé par la prière : chaque soir du Ômer, à la nuit, l'on se tient debout et l'on prononce le numéro du jour du Ômer. Pendant ces sept semaines, il est recommandé de se recueillir sur son niveau spirituel et sa préparation à recevoir bientôt la Torah, comme si l'on avait été soi-même dans le désert.
Un ômer est une mesure volumique biblique, correspondant à environ 2.2 litres. On apportait une offrande collective d'un ômer de farine d'orge pétrie à l'huile et à l'encens, que trois délégués du Beth Din moissonnaient dans les champs en présence de tout le peuple au cours d'une cérémonie joyeuse.
En détail :
La fête de Lag Baomer - trente-troisième jour dans le compte du Omer - semble être une énigme pour beaucoup d'entre nous…
Lag Baomer constitue un havre de joie au milieu de cette période de tristesse qu'est la Sefira.
Trente-trois jours après le premier jour de Pessah, le Juifs célèbrent une fête "mineure" appelée Lag BaOmer, littéralement le trente-troisième jour du Omer. Elle constitue un havre de joie au milieu de cette période de tristesse qu'est la Sefira, tristesse qui n'est presque pas observée de nos jours par les Juifs. Cependant, la fête de Lag Baomer, elle-même, est chargée d'un héritage historique dont l'enseignement est si grave que, au-delà du mystère qu'elle se doit de démêler, notre génération découvrira également que son propre destin s'y trouve inscrit.
Pendant les sept semaines séparant Pessah et Chavouot, on procède au "Compte du Omer"; c'est aussi durant cette période qu'on fêtait les moissons dans le pays d'Israël quand le Temple se trouvait sur le mont Moria à Jérusalem.
Ces cinquante jours auraient dû être une période d'attente joyeuse pour chaque Juif. Sorti d'Egypte à Pessah, il va, au sens propre, compter maintenant les jours qui le séparent du Matan Torah - la révélation de la Torah au mont Sinaï qui aura lieu à Chavouot, exactement cinquante jours après l'Exode. Alors que l'Exode marque la naissance physique de la nation juive, le Don de la Torah en complète le processus au plan spirituel.
Chaque année, au cours du Seder de Pessah, il nous est ordonné de "nous considérer comme si nous étions nous-mêmes sortis d'Egypte." Pendant la période de la Sefira, nous devons donc nous préparer de nouveau à recevoir la Torah à Chavouot afin que notre liberté soit acquise pleinement également du point de vue spirituel.
Manifestement, les jours de la Sefira auraient dû être un temps pour la joie; mais, au contraire, on observe pendant cette période un demi-deuil. Il n'est pas permis de se marier, d'écouter de la musique et de se couper les cheveux; certains ne se rasent pas pendant toute cette période. C'est en naviguant dans un océan d'affliction que nous abordons la fête de Lag Baomer, le seul jour durant lequel notre deuil s'interrompt et que la tristesse est prohibée.
MORT DES DISCIPLES DE RABBI AKIBA
Quelle est la raison de cette tristesse dans une période qui devrait être vouée à la joie pure de l'attente ?
Le Talmud de Babylone nous en donne l'explication (Yebamot 62b): c'est pendant la Sefira, il y a 1850 ans, alors que les Romains régentaient la Terre d'Israël, que les 24.000 disciples de Rabbi Akiba ont été enlevés par une épidémie mystérieuse envoyée par D.ieu. Pourquoi sont-ils morts? En raison, nous dit le Talmud, "du manque d'estime qu'ils se portaient mutuellement." On célèbre Lag BaOmer car l'épidémie s'est arrêtée le trente-troisième jour et les élèves de Rabbi Akiba ont cessé de mourir.
Cependant, malgré cette explication, un certain nombre de difficultés ne sont pas levées et des questions demeurent sans réponse.
Pourquoi donc cet événement, la mort des disciples de rabbi Akiba, aussi tragique soit-il, mérite-t-il un deuil de trente-trois jours tandis que des tragédies bien plus grandes de l'histoire juive, telles que la destruction des deux Temples ou le bris des Tables de l'Alliance par Moïse, ne sont marquées que par un seul jour d'affliction.
Du point de vue simplement numérique, les massacres de l'Inquisition espagnole, les Croisades, les pogroms de Chmielinski et la Shoah qui a détruit le judaïsme européen et a anéanti six millions de Juifs, éclipsent presque totalement la mort des disciples de Rabbi Akiba. Pourtant, ces événements effroyables ne sont même pas commémorés par un jour spécial de deuil. Pourquoi la mort des disciples de Rabbi Akiba a-t-elle un tel poids?
Chaque événement du calendrier juif y fut placé par la main de D.ieu, conformément à la signification préétablie des saisons et de l'histoire. Nature et événements s'imbriquent les uns dans les autres, certains jours et certaines périodes étant plus favorables à la joie ou à la tristesse. Pourquoi le deuil de la Sefira tombe-t-il entre les fêtes joyeuses de Pessah et de Chavouot, qui, elles-mêmes, coïncident avec les festivités de la moisson?
Il est aussi incontestable que cette histoire est pleine d'incohérences. De quoi les disciples de Rabbi Akiba étaient-ils coupables pour être ainsi passibles de la mort? S'ils moururent à cause de leurs péchés, pourquoi devons-nous les pleurer? Méritaient-ils leur punition?
Pourquoi Lag BaOmer est-il un jour de "fête"? Si tout ce qui s'était passé à Lag BaOmer n'était en fait qu'une pause dans le déroulement d'événements funestes, n'aurait-il pas fallu plutôt dédier ce jour à la mémoire des vingt-quatre mille élèves qui sont morts?
Quel est le lien entre Lag BaOmer et la révolte de Bar Ko'hba et de son armée contre les Romains? Et comment tout ceci se rapporte-t-il à Rabbi Shimon Bar Yo'haï, auteur du livre mystique du Zohar, qui vivait à la même époque et que nous célébrons à Lag Baomer?
Et enfin, pour quelle raison n'aborde-t-on jamais ouvertement toutes ces questions, comme on pose, par exemple, les Quatre Questions de la Haggadah de Pessah?
Il y a encore d'autres questions. C'est l'histoire de cette période particulièrement agitée et les mystères entourant le concept juif de l'ère messianique qui en sont la clé.
LA RÉVOLTE
Il faut d'abord être conscient que presque tout ce qui touche dans le Talmud aux affaires politiques a été écrit en prenant compte de la censure romaine. Il n'était pas question pour le Talmud de traiter publiquement d'événements ayant des ramifications politiques. Afin d'avoir une idée claire de ce qui s'est passé réellement, nous devons reconstituer le récit à partir de différentes sources historiques et de ce que le Talmud nous fait entendre par allusion. Et voici ce que nous pouvons à peu près dire:
Le deuxième Temple fut détruit par les Romains en l'an 70 de l'ère chrétienne. Jérusalem et sa campagne alentour furent ravagées complètement. Des dizaines de milliers de Juifs furent tués dans des combats féroces; des milliers d'autres moururent à la suite des persécutions et de la famine ou furent vendus comme esclaves et forcés à l'exil. Les Romains considérèrent alors que la nation juive était définitivement vaincue, détruite, effacée. Le général romain Titus érigea à Rome un monument grandiose célébrant sa victoire - celui-ci, le fameux Arc de Titus, existe encore de nos jours - sur lequel fut inscrit Judea Capita - la Judée est finie, détruite.
Mais bien que vaincus, les dirigeants spirituels du peuple juif s'efforcèrent de réédifier une vie juive et de reconstituer ses institutions. Leurs efforts furent couronnés de tant de succès que, aux alentours de l'an 135, un chef militaire juif, nommé Bar Kosiba, réussit à organiser des forces combattantes afin de délivrer la terre d'Israël de ces Romains si détestés. Des milliers de personnes se rallièrent à sa cause et parmi eux, tout particulièrement, le maître du Talmud le plus grand de tous les temps, le Tanna Rabbi Akiba ben Josaph, dont la perspicacité et les brillantes décisions nous ont été transmises par la Mishna.
Beaucoup de contemporains de Rabbi Akiba eurent, néanmoins, le sentiment que la nouvelle révolte contre les Romains était vouée à l'échec et firent pression pour qu'on évite une effusion de sang. Mais Bar Kosiba s'obstina dans son projet et réussit à rassembler et à entraîner une magnifique armée forte de 200,000 hommes. Le Talmud relate que Bar Kosiba exigeait de chaque recrue de prouver sa bravoure en se coupant un doigt; les Rabbins protestèrent. A la place de cette épreuve, les nouveaux combattants durent désormais déraciner un jeune arbre en montant un cheval lancé au galop.
Rabbi Akiba n'était pas d'accord avec ses collègues; il convainquit une majorité d'entre eux de la justesse de son point de vue.
Certains historiens affirment que les Juifs représentaient vingt pour cent de la population de l'Empire romain.
Sur le plan militaire, il pensait que la révolte pouvait réussir. Certains historiens affirment, en effet, que les Juifs représentaient vingt pour cent de la population de l'Empire romain.
Les fondations païennes de Rome étaient en train de s'effriter. Beaucoup de Romains étaient en quête d'une solution de rechange - ils l'ont trouvée deux siècles plus tard dans la religion chrétienne beaucoup moins exigeante pour l'observance des Commandements. Le Judaïsme les attirait et un certain nombre se convertirent. Il y avait des milliers, si ce n'est des dizaines de milliers, de sympathisants. Quelques membres du Sénat romain devinrent juifs. Beaucoup d'historiens estiment que l'espoir de renverser Rome au moyen d'une série de révoltes coordonnées entre elles était partagé par le grand nombre de Juifs qui vivaient dans l'empire romain.
PROCLAMATION DU MESSIE
Rabbi Akiba croyait que le succès de la révolte et le retour des Juifs de tous les coins de la terre dans leur patrie et sa reconstruction pourraient amener l'ère messianique. - cet âge où régneraient la spiritualité et la paix universelle annoncées par les Prophètes d'Israël, ces temps futurs qui verraient tous les Juifs retourner dans le Pays d'Israël, où l'on assisterait à la réédification duTemple de Jérusalem et où le monde, guidé par les Juifs, s'engagerait dans une ère de justice, de renouveau spirituel et d'accomplissement.
Dans son livre "Les Lois de la Royauté" (Chapitre 11,3), Maïmonide dit à propos de l'ère messianique: "Il ne faut pas croire que le Roi Messie doit accomplir des miracles ou produire des prodiges, créer de nouveaux phénomènes naturels, faire revivre les morts ou réaliser des choses semblables. Absolument pas. Car Rabbi Akiba, le plus sage de tous les érudits de la Mishna, fut le chevalier d'armes du Roi Ben Kosiba (le vrai nom de Bar Ko'hba). Il a dit de Ben Kosiba qu'il était le Roi Messie. Lui-même et les sages de sa génération ont cru que Bar Kosiba était le Roi Messie, jusqu'à ce qu'il fût tué à cause de ses péchés. Une fois qu'il fut mort, il leur parut évident que ce n'était pas le messie."
Pour Bar Ko'hba et ses officiers, tout leur semblait fin prêt; Rome se trouvait dans un état avancé de pourriture et de dépravation, beaucoup de nations captives renâclaient sous le joug; bref, la rébellion était dans l'air. Rabbi Akiba (Le Talmud de Jérusalem, Taanit, 4,15) donna un nouveau nom à Bar Kosiba, "Bar Ko'hba", le Fils de l'Etoile, afin d'accomplir la prophétie "une étoile sortira de Jacob". Bar Ko'hba avait préparé une armée capable de mettre le feu au baril de poudre de la révolte; Rabbi Akiba en fut, lui, le catalyseur en faisant une des proclamations les plus dramatiques de l'histoire juive - il déclara que Bar Ko'hba était le Messie attendu depuis si longtemps.
Un des plus grands maîtres de la Torah et un des plus grands dirigeants de tous les temps ne pouvait pas avoir fait cette déclaration aussi décisive et fondamentale sans en être absolument certain. Il n'aurait jamais proclamé qu'un homme est le Messie s'il ne le savait pas. Rabbi Akiba ajouta une nouvelle dimension à cette guerre de libération. Ce fut une dimension spirituelle; il tenta d'adjoindre aux soldats du glaive les soldats du livre - ses vingt-quatre mille disciples, chacun d'entre eux étant un grand érudit de la Torah et un leader.
Ces éminents érudits auraient dû ainsi être destinés à devenir la véritable "armée" du peuple juif, une force morale et spirituelle.
Ces éminents érudits auraient dû ainsi être destinés à devenir la véritable "armée" du peuple juif, une force morale et spirituelle qui aurait apporté la Torah au monde entier et l'aurait aidé à surmonter l'angoisse et la souffrance et à triompher de la botte cruelle de l'Empire romain corrompu.
Ils auraient alors instauré très vite une nouvelle ère de paix, de vertu et de justice, une ère où "la connaissance de D.ieu recouvrirait la terre comme l'eau des océans." Le fait que les Juifs furent capables de s'unir autour d'un seul leader diffère notablement de ce qui s'était passé pendant la grande révolte du siècle précédent, où, divisés farouchement en factions, ils se combattirent les uns les autres à l'intérieur des remparts de Jérusalem alors que les troupes romaines prenaient d'assaut les portes de la ville.
La rébellion fit rage pendant six ans. L'armée de Bar Ko'hba remporta au début beaucoup de victoires. De nombreux non-juifs se joignirent à son armée; on rapporte que son effectif atteignit 350,000 soldats, plus que celui de l'armée romaine. Le succès de Bar Ko'hba fut si grand que l'empereur romain Hadrien fit appel à toutes ses meilleures unités d'Angleterre et de Gaule. Rome se sentit menacée comme elle ne l'avait jamais été auparavant.
A Lag Baomer, comme certains le pensent, l'armée de Bar Ko'hba reconquit Jérusalem; ce haut fait est célébré de nos jours. L'indépendance juive fut restaurée pendant quatre ans. Beaucoup croient que Bar Ko'hba entreprit réellement de reconstruire le Beit Hamikdach, le Temple. D'autres même sont persuadés qu'il acheva l'édification du Troisième Temple.
LA CHUTE DE BAR KO'HBA
Quand l'insurrection débuta, Il y avait deux légions romaines stationnées dans le pays, l'une à Jérusalem et l'autre près de Mégido. Elles furent toutes deux décimées par les soldats de Bar Ko'hba. Des renforts furent dépêchés de Trans-Jordanie, de Syrie et d'Egypte mais ceux-ci furent également écrasés. La légion venant d'Egypte, la 22ième, disparut des listes des régiments publiées à Rome; des historiens avancent l'idée qu'elle subit un revers si cuisant, probablement aux alentours de La'hich, qu'elle cessa d'exister comme force organisée. Les Juifs employaient apparemment les méthodes de la guérilla - cachés dans des repaires, ils en sortaient pour mener des opérations d'incursions, des embuscades et des attaques nocturnes.
En désespoir de cause, Hadrien expédia son meilleur commandant, Julius Severus, engagé alors dans une bataille au fin fond du Pays de Galles. Severus emmena avec lui des légions des pays de Bretagne, de Suisse, d'Autriche, de Hongrie et de Bulgarie. Les Romains avaient été touchés si durement dans cette campagne meurtrière que Severus, revenu à Rome pour faire part au Sénat de sa victoire, omit de prononcer la formule traditionnelle: "Je vais bien ainsi que mon armée".
Il est admis maintenant que cette trahison fut le fait des Chrétiens juifs qui cherchaient à saper l'autorité de Bar Ko'hba.
Ce fut une guerre totale. Au beau milieu de ses efforts pour reconstruire le Temple, le sort s'inversa et Bar Ko'hba perdit le support de Rabbi Akiba et des sages qui l'avaient soutenu jusque là. Que s'était-il passé? Bar Ko'hba avait assassiné Rabbi Elazar. Il avait accusé ce grand maître d'avoir révélé aux Romains l'emplacement des entrées secrètes de la cité fortifiée de Betar. Il est admis maintenant que cette trahison fut le fait des Chrétiens juifs qui cherchaient à saper l'autorité de Bar Ko'hba. Rabbi Akiba réalisa alors que Bar Ko'hba ne possédait plus les qualités pour être le Messie ainsi qu'il le pensait au début.
Il faut considérer l'échec de la vocation messianique de Bar Ko'hba également sur un plan spirituel; que la cause en soit l'échec spirituel des disciples de Rabbi Akiba ou la tentative infructueuse de Bar Ko'hba de s'élever au niveau spirituel escompté pour être le Messie, cela est de toute manière au-delà de notre connaissance. C'est alors, que descendue du ciel, la grande plaie appelée Askera frappa. Le rêve se brisa. Pour des raisons qui probablement resteront pour toujours obscures, le Ciel considéra que les disciples de Rabbi Akiba n'avaient pas atteint le niveau spirituel suprême permettant de susciter l'Ere messianique. Aussi grands qu'ils puissent avoir été, il a manqué un facteur décisif.
Le Talmud dit que " les disciples de Rabbi Akiba ne se témoignaient pas suffisamment d'estime les uns les autres." Ce que cette phrase veut dire précisément, nous ne le savons pas. La grandeur implique de plus hautes responsabilités; d'autant plus grandes également en sont la récompense et la punition. En raison de leur échec et de leurs imperfections - qui seraient sûrement regardés comme mineurs pour notre génération mais qui, pour des hommes de cette envergure et de ce niveau spirituel, s'avérèrent être décisifs - leur mission fut annulée et ils moururent de mort mystérieuse.
Bar Ko'hba ne fut pas un faux messie mais un messie qui a échoué.
Avec eux s'éteignait le rêve messianique, en ce temps-là ainsi que pour des milliers d'années à venir. Bar Ko'hba ne fut pas un faux messie mais un messie qui a échoué. Au cours des combats gigantesques pour défendre la cité fortifiée de Bétar, Bar Ko'hba et son armée furent écrasés. Cette guerre avait été une catastrophe.
D'après Dodio Cassius, 580.000 Juifs périrent dans la bataille avec les Romains sans parler de ceux qui moururent de faim ou de maladie. Certains historiens pensent que la plus grande partie des habitants de Judée fut anéantie dans les combats ou dans les massacres qui s'ensuivirent. L'un d'entre eux émet l'avis que le tiers des Juifs mourut lors de la guerre, un nombre qui serait peut-être plus élevé que celui des pertes subies pendant la grande révolte de l'année 70.
Pour les survivants, le soulèvement de Bar Ko'hba marque la fin du rêve d'indépendance nationale et le début de la Diaspora. Le traumatisme causé par la débâcle de Bétar qui suivit la chute de Jérusalem, imprima des changements profonds au sein du peuple juif. Ce peuple, à la nuque raide, entêté, prêt à lutter pour son indépendance jusqu'à l'extrême, qui n'hésita pas à asséner de façon répétitive des coups suicidaires à la plus grande superpuissance de l'antiquité, perdit son instinct guerrier.
Il lui faudra 2000 ans pour constituer de nouveau une force de combat juive. Autre conséquence, il devra attendre au moins 2000 ans afin de voir son espérance de délivrance se concrétiser. Car cette grande défaite ne fut pas tragique seulement à cause de la mort de cinq cent à six cent mille Juifs mais en raison de la détermination des Romains d'éradiquer, une fois pour toutes, la religion et le peuple juifs - de mettre fin à ses espoirs et à ses rêves.
LE DEUIL DE NOS JOURS
Voilà la raison pour laquelle nous observons le deuil aujourd'hui. Car le deuil de la Sefirah, ce n'est pas seulement pour la mort des disciples mais pour la tentative ratée du peuple juif d'amener l'Ere messianique, pour son indépendance, ses espérances et ses aspirations messianiques sur lesquelles se referma brutalement le rideau de l'histoire.
A partir de ce jour et cela depuis 2000 ans, chaque vague d'antisémitisme, chaque pogrom, chaque massacre, les Croisades, les expulsions, la Shoah, qui ont pris la vie à des millions de Juifs, cette nuit de l'exil amère et sans fin, l'errance et les persécutions, tous doivent être imputés à l'échec de Bar Ko'hba- et en fin de compte à celui des disciples de Rabbi Akiba.
La conséquence en fut désastreuse et hors de proportion aussi bien pour le monde en proie à la guerre et subissant le joug romain que pour le peuple juif. Rome ne tomba pas cette fois-ci mais l'exil du peuple juif et son démembrement furent provoqués par son acharnement et par sa fureur.
Pourtant, pendant cette même nuit de Lag Baomer, il y a deux mille ans, émergea la lumière renouvelée de l'espoir. En pleine défaite, le grand sage Rabbi Shimon Bar Yo'haï révéla à un nombre restreint de disciples les secrets du Zohar. Ce livre mystique, de niveau spirituel incomparable, détient, dans sa formulation et les sujets traités, les secrets qui permettront d'engendrer la venue du Messie. Il inaugure une tradition qui conservera vivante l'espérance en ce jour. A Lag Baomer, le fléau cessa, le rêve fut repoussé mais non pas détruit. Entretenu de génération en génération, il continue à nous animer jusqu'aujourd'hui.
Du fait que Lag Baomer touche aux secrets de l'Ere Messianique future, on ne peut pas en soulever le sujet ouvertement ou en comprendre la signification aussi aisément que celle de l'Exode ou celle d'autres événements du passé. Chaque fois que nous nous trouvons entre Pessah et Chavouot - c'est-à-dire, entre la délivrance physique d'Egypte et l'élévation spirituelle de la Révélation du Sinaï - nous nous remémorons ces affreux événements. En célébrant de nos jours la libération de Jérusalem, peu avant Chavouot, nous avons aussi devant nos yeux le site de notre Temple détruit. L'histoire imbrique une quantité infinie d'événements cruciaux, faisant resurgir à tout moment notre passé sur la terre de nos pères.
Après la destruction des grands centres d'étude de la Torah en Europe orientale, on assista aussi à la reconstruction des Yeshivot en Israël, au Etats-Unis et en France.
Il y a cependant un parallèle stupéfiant entre notre époque et celle de Rabbi Akiba et Bar Ko'hba. Après cette Shoah épouvantable, qui, pour beaucoup, signifiait la fin du peuple juif, on assista à la restauration de l'indépendance juive - une fois de plus, une armée juive accumulait des victoires miraculeuses alors que tout était contre elle. Après la destruction des grands centres d'étude de la Torah en Europe orientale, on assista aussi à la reconstruction des Yeshivot en Israël, au Etats-Unis et en France. Depuis lors, l'étude de la Torah connaît un formidable renouveau. Le mouvement de Techouva a ramené à la Torah beaucoup de Juifs qui s'étaient égarés. Jérusalem et le Mont du Temple sont entre nos mains.
Tout autour de nous, des empires vacillent tandis que le désespoir s'installe et que la corruption fait rage. Une fois de plus, le peuple juif se voit confier une opportunité immense et terrifiante. Une fois de plus, il nous est loisible de recréer dans notre pays une civilisation juive mue par la Torah. Réussirons-nous ou bien est-ce que tous nos efforts n'aboutiront pas à cause de nos propres échecs, de notre incapacité de respecter les différences existant dans la communauté de la Torah et de rassembler le peuple juif autour de notre cause?
Les leçons que nous tirons de la personnalité de Rabbi Akiba sont terribles. C'est à nous d'en saisir l'opportunité. C'est lui qui a compris que "d'aimer son prochain comme soi-même" est le principe prépondérant que le peuple de la Torah doit assimiler s'il veut atteindre ses objectifs. Rabbi Akiba, le ba'al techouva par excellence, qui, à quarante ans, ne pouvait distinguer le aleph du beth, ce même homme, après avoir gravi tous les échelons, est devenu le plus grand maître de la Torah.
Des centaines de milliers de Juifs, israéliens, américains, russes, français sont, potentiellement, des Rabbi Akiba. Le destin du Judaïsme et l'accomplissement des grands desseins divins sont dans les mains de cette génération. Essaierons-nous de les réaliser ou nous retirerons-nous égoïstement dans notre cocon en refusant d'assumer les responsabilités que l'histoire et le D.ieu de l'Histoire nous ont assignées?
Ce n'est pas suffisant d'attendre le Messie. Si nous voulons hâter sa venue, nous devons renouveler nos efforts pour faire de notre vie une authentique vie de Torah. L'enseignement que nous laissent les disciples de Rabbi Akiba est clair: la venue du Messie ne dépend que de nous.
La période de l'Omer est l'occasion didactique d'inculquer certaines valeurs aux enfants...
La Fête de Pessa’h et ses préparatifs ont été particulièrement riches en gestes et en événements concrets ; nos enfants ont pu pendant cette période faste, revivre ou répéter à l'envie, la sortie d'Egypte et la libération du dur esclavage. Tous ces magnifiques miracles, pourquoi et dans quel but ?
La période de l'Omer et le Comput des jours et des semaines, permettent à leur tour, de rendre sensible l'attente impatiente du grand jour du Sinaï. Les exemples ne manquent pas, dans notre vie courante, du compte fébrile des jours qui nous séparent d'un évènement ardemment attendu. On s'en servira donc pour montrer combien, Chavouoth est l'aboutissement tant espéré de notre sortie d'Egypte.
Sur le plan pratique on reviendra sur la quatrième coupe de vin du Séder qui correspond à l'expression : «et je vous prendrai pour moi comme peuple» pour faire réfléchir ou montrer que cela ne s'est réalisé réellement qu'à Chavouoth.
On rappellera également à ce propos que Chavouoth a été le but de la sortie d'Egypte assigné à Moïse, dans la merveilleuse « histoire» du buisson ardent, qui sera à nouveau racontée avec profit.
Le compte de l'Omer marque les étapes et les progrès journaliers à faire, pour se débarrasser des mauvaises influences et habitudes prises en Egypte.
On peut très bien faire des petits tableaux avec ses enfants, en utilisant gommettes ou bons points qui serviront à marquer les progrès accomplis durant cette période pour améliorer son comportement quotidien.
Il faut prendre garde à ne pas mélanger ces indications avec les manifestations de tristesse de la même période (ne pas se raser, ne pas se couper les cheveux, pas de mariage, pas de musique) qui se situent à un autre moment de notre histoire.
Par contre, ces manifestations concrètes de demi-deuil, doivent être largement utilisées, pour parler de l'épidémie qui a frappé les prestigieux élèves de Rabbi Aquiba, gravement coupables de n'avoir pas su s'aimer et se respecter mutuellement. C'est une occasion très favorable pour enseigner et parler de l'importance des commandements du respect et de l’amour d'autrui et de leur place de choix dans les 613 Mitzvot.
La fête de Chavouoth est appelée Zmane Matane Toraténou (Moment du don de notre Torah). C'est donc la fête du cadeau de la Torah.
On ne donne de cadeau qu'à des personnes que l'on aime et que l'on veut honorer.
Plus le cadeau est mirifique, plus le récipiendaire sait qu'il est apprécié par le donateur.
Pour pouvoir concrétiser cette notion, il importe de se servir des innombrables récits talmudiques et midrachiques, dont beaucoup existent en traduction, et qui décrivent abondamment l'exceptionnelle qualité du «cadeau» et le formidable déploiement des manifestations divines qui ont présidé à sa remise. Il faut se donner pour cela les moyens de faire, chacun à sa manière et en fonction de l'âge des enfants, une sorte de nouvelle Haggadah de Chavouoth.
Par ailleurs, les Dix Paroles pourront servir de base à toutes sortes de travaux manuels et de dessins.
On pourra les lire ou les apprendre car le texte est relativement facile. Il ne faudra pas hésiter d'en faire un objet d'échange conversationnel à partir duquel les enfants pourront exprimer leur propre compréhension de ces commandements et la façon dont ils en saisissent l'importance dans leur vécu habituel. Cette procédure, nous le savons par expérience, est souvent très révélatrice et enrichissante, surtout lorsqu'on aborde le Chabbath, l'interdit de voler et bien sûr l'honneur et le respect dus aux parents.
Ne pas oublier la magnifique et touchante histoire de Ruth qui se lit et se raconte pour tous les âges.
Si on veut aborder ce récit avec les plus grands : Ruth dans la collection Artscroll est par exemple, un très bon outil de préparation.
De même, pour les plus avancés, il ne faudra pas omettre d'étudier la Michna Bikourim (qui existe en traduction française) puisque Chavouoth est aussi la « fête des Prémices».
A noter que dans le traité Bikourim plusieurs textes se prêtent à une lecture très imagée de l'offrande des prémices à Jérusalem.