En bref :
Pourim est l'une des fêtes les plus joyeuses de toutes les fêtes. Nous avons le devoir de nous rappeler que nous avons survécu au décret d'extermination du peuple juif, annoncé par le fourbe Hamman. Cette histoire est relatée dans la Méguila, écrite pas Ésther. Nous avons d'ailleur la misva de la lire.Voici les quatres misvoths à faire à Pourim :
- Écouter la méguila.
- Faire un grand festin.
- Donner des cadeaux à un ami (ou plusieurs).
- Donner de l'argent aux pauvres (au moins 2).
En détail :
Contexte historique
Les livres de Daniel (chap. 1-9) et d'Ezra (chap. 1-6) nous donnent le contexte du récit de la Meguila. Ce fut au Ve-IVe siècle av., époque où le peuple juif, déjà exilé en Babylonie, avait perdu sa souveraineté et son sanctuaire et était exilé en Babylonie. Cet empire était tombé aux mains des Perses et s'étendait de l'Inde à l'Ethiopie. Cyrus avait donné la permission aux Juifs de retourner en Israël (qui se trouvait également sous sa domination) et d'y reconstruire le Temple. Une partie du peuple s'y était rendue et, dans des conditions difficiles, avait jeté les fondations du sanctuaire. Sous le règne d'Assuérus, les Samaritains, intriguant contre les Juifs, les accusèrent de vouloir se révolter contre la Perse ; le roi prêta foi à ces accusations et fit arrêter la construction du Temple. Les travaux ne purent être repris qu'au temps de Darius.
L'histoire de Pourim se situe donc à une époque où une partie du peuple juif se trouvait en Israël attendant de pouvoir réédifier le Temple ; l'autre était dispersée dans l'empire perse. A Suze, lieu de résidence d'Assuérus, il y avait également une communauté juive : c'est là où notre récit se déroule.
Histoire de Pourim
La troisième année de son règne, lorsque son trône est consolidé, Assuérus donne un festin durant cent quatre-vingts jours et y convie les satrapes et les notables des cent vingt-sept provinces de son royaume. A la fin de ces festivités, il invite pendant une semaine tous les habitants de Suze à un nouveau festin. Le dernier jour, le roi ordonne à sa femme, la reine Vachti, de paraître devant tous les hommes pour montrer sa beauté. Vachti refuse. Le roi consulte les Sages et l'un d'entre eux, s'appelant Memoukhan (d'après la tradition orale, c'est Aman), lui conseille de répudier la reine. Il prétend notamment que la conduite intolérable de Vachti pourrait devenir un précédent fâcheux pour les autres femmes qui seraient, elles aussi, incitées à manquer de respect à leur mari. Le conseil de Memoukhan est suivi et, en outre, des ordonnances sont expédiées dans tout le royaume exigeant le respect du mari dans tous les foyers.
Assuérus, cherchant une nouvelle reine, fait réunir plusieurs belles jeunes filles. Parmi celles-ci, Esther, la seule à ne faire aucun effort pour plaire au roi, attire les sympathies de tous et est choisie. C'est une orpheline juive, nièce et pupille de Mardochée. Elle devient reine et, suivant le conseil de son tuteur, ne fait pas connaître son origine. Elle continue à garder contact avec lui, et suit ses instructions et ses conseils.
Mardochée découvre un complot contre le roi et l'en prévient par le truchement d'Esther. Le fait est consigné dans le livre des Annales ; aucune récompense ne lui est donnée.
Assuérus élève Aman, descendant d'Agag (roi des Amalécites), au plus haut rang de la hiérarchie. Tout le monde doit se prosterner devant lui. Mardochée refuse.
Courroucé contre Mardochée, Aman veut exterminer tous les Juifs. Au mois de Nissan, il procède à un tirage au sort qui désigne le 13 Adar comme date propice au massacre. Il persuade le roi de donner son accord, lui offre même une somme énorme en échange des pleins pouvoirs. Ils lui sont remis et un décret royal publié dans tout l'empire annonce que la population entière doit se tenir prête à la date susdite.
Mardochée fait dire à Esther d'intercéder auprès du roi pour sauver son peuple. Après quelques hésitations, elle accepte mais lui demande de faire décréter d'abord un jeûne de trois jours dans la communauté juive de Suze.
Le troisième jour, Esther, au péril de sa vie (ne peut se présenter devant le roi que celui qui y est appelé), invite le roi et Aman à une fête intime. Au cours du banquet, Assuérus lui demande ce qu'elle désire et Esther ne répond pas. Elle invite pour le lendemain le souverain et Aman à un nouveau festin et promet à cette occasion de faire connaître au roi sa requête.
Aman sort du banquet royal gonflé d'orgueil et de joie. Croisant Mardochée qui ne s'incline pas devant lui, il est pris d'une fureur irrésistible. La nuit même, il érige une potence et attend le lever du jour pour recevoir du roi l'autorisation d'y pendre Mardochée.
La même nuit, Assuérus, ne comprenant rien à la signification du dîner offert par Esther, est inquiet et ne parvient pas à s'endormir. Il ordonne à ses serviteurs de lui lire les Annales. Comme par hasard, le livre est ouvert à la page où est consigné le bienfait de Mardochée.
Le roi veut le récompenser au plus tôt.
A l'aube, Aman se présente devant le souverain qui, ne lui laissant pas le temps de formuler sa requête, veut connaître quelle rétribution il proposerait pour un homme de mérite. Aman, croyant qu'il s'agit de lui-même, propose qu'on le fasse chevaucher en tenue royale dans la capitale pendant qu'un dignitaire proclamerait à ses côtés : "Voilà ce qui se fait pour l'homme que le roi veut honorer !" Assuérus dit à Aman que les honneurs sont destinés à Mardochée et que le dignitaire sera Aman en personne. L'ordre est exécuté.
Sans avoir eu le temps de se remettre de sa honte, Aman doit se rendre au festin d'Esther. Au cours du banquet, Esther révèle au roi qu'elle est juive et accuse Aman de tramer un complot contre la reine et son peuple. Assuérus, sous l'effet de la surprise, est pris d'une rage folle (il avait déjà donné son accord à Aman). Dans son désarroi, il quitte la salle. Aman, saisi de panique implore la pitié d'Esther et trébuche sur le divan. Le roi revient et, croyant qu'Aman fait la cour à la reine, se fâche de plus belle. Un serviteur révèle qu'Aman avait préparé une potence pour Mardochée (qui avait sauvé la vie du roi) et, immédiatement, le bourreau y est pendu.
Assuérus, apprenant que Mardochée est l'oncle de la reine, le nomme premier vizir à la place d'Aman.
Sous l'influence d'Esther et de Mardochée, le roi établit de nouveaux décrets proclamant le 13 Adar comme journée d'autodéfense pour les Juifs. Le 14 Adar, lendemain de la victoire, devient, à la place d'un jour de deuil, un jour de fête. Tous ces faits sont consignés par Mardochée et Esther dans un mémoire s'intitulant la Meguila (le rouleau) d'Esther.
La fête de Pourim :
Pourim se fête le 14 Adar (dernier mois du calendrier juif) pour les villes ouvertes, et le 15 Adar pour les villes qui étaient entourées d'une enceinte dans l'Antiquité. C'est que, dans toutes les villes, la bataille se termina le 13, tandis qu'à Suze, qui était une ville fortifiée, la bataille ne se termina que le 14. Jérusalem est parmi les villes qui fêtent Pourim le 15.
"Pourim" signifie en perse "sorts". Cela en souvenir du sort qu'Aman avait consulté pour fixer la date d'extermination des Juifs.
Les rites de la fête sont :
- cadeaux aux amis (sous forme de mets) ;
- cadeaux aux pauvres (sous toutes les formes) ;
- lecture soir et matin de la Meguila, récitation d'une prière de remerciement dans la 'amida et le birkath hamazone ;
- grands festins arrosés de vin et de boissons ;
- réjouissances de toutes sortes.
On est tenu de boire à Pourim jusqu'à ce qu'on ne sache plus différencier entre "Béni soit Mardochée et maudit soit Haman". (Talmud Méguila 7b)
Avouons que c'est un peu fort !
Tout le long de l'année l'éthique juive prêche modération et sobriété et soudainement, ici à Pourim on dérape.
A vrai dire on nous fait déraper et ce sont les rabbins eux-mêmes qui nous incitent à nous enivrer.
Buvez, caressez la bouteille ! Buvez autant que vous désirez et même plus que cela...
Pour être exact : "ad de lo ya'da"-jusqu'à ce qu'on ne sache plus ! C'est-à-dire qu'on ne s'y retrouve plus entre le maudit de Haman et le béni de Mardochée.
Peut-être que nous pouvons trouver une allusion à la réponse dans le vocabulaire même que nos sages ont utilisé. Regardons, ils n'ont pas dit tout simplement : "Enivrez vous". Le terme qu'ils ont employé ici est Libesoumé. On est tenu libesoumé. La traduction exacte de ce terme est "adoucir" ou encore "parfumer" (comme besamim dans la bénédiction de havda'la). Comme si tout en buvant nous nous parfumions...
On cherche à travers l'histoire de Pourim à nous faire savoir que les vertus et les vérités de la Torah doivent être si profondément ancrés dans l'âme de l'homme que même tout en étant saoul, ce ne sont rien que ces vertus et ces vérités qui sortent de sa bouche.
Ainsi l'intention de nos sages n'était à aucun moment d'enseigner à dire les choses de travers à Pourim. Ils ont par contre dit de boire jusqu'à ce que la raison et la conscience ne sachent plus faire la part des choses.
Si dans cet état d'ébriété c'est quand même le "béni Mardochée" qui sort de la bouche, alors nous savons que cette personne est vraiment parfumée et que les valeurs de la Torah remplissent toutes les chambres de son coeur.
Pourim est aussi une certaine métaphore ; ce monde, notre monde matérialiste, il saoule. Les mass-médias, les articles de luxe et la vie de douceur nous enivrent littéralement. Leur puissance est telle qu'ils nous privent en grande partie de notre lucidité et de notre faculté de jugement.
Pareillement, du temps de Assuérus, les juifs furent enivrés par l'étincellement des splendeurs royales et ils furent saoulés par les banquets et les festins somptueux que le monarque offrit. Dans cette ivresse générale, il ne restait que Mardochée pour reconnaître la vérité.
"Morde'hai Hayehoudi" . Ainsi il est appelé dans la Meguila. Mardochée le juif. Celui qui était le juif à part entière. Nous parlons souvent de l'obligation d'être consciemment juif, or Mardoché était celui qui a laissé les paroles de la Torah pénétrer au plus profond de son être, celui qui était juif même inconsciemment.
Le Talmud ('Houlin 139 b) relève qu'il se trouve une allusion au nom de Mardochée dans la Torah. A savoir que dans l'huile d'onction, destinée à l'inauguration des ustensiles du Tabernacle, Maré da'hia (comme Morde'hai), le myrte était un des "besamim", une des épices odoriférantes indispensables pour cette huile d'onction.
Avec tout ceci, l'histoire juive, Morde'hai et Pourim, nous avons une étincelle ; ce parfum qui émane de notre étude quotidienne de la Torah et qui continue à nous guider même là où le matérialisme (et l'alcool) semblent prendre possession de notre monde contemporain.